En mars, j'ai été taguée plusieurs fois (Boutfil, Francis, Dana) sur la lecture.
J'ai pris le temps, mais voilà ma réponse :
Du plus loin que je me souvienne, j'ai toujours été entourée de livres.
Il y avait des livres partout dans mon enfance, sur la table du salon, au petit coin.
Très important le petit coin. Moment de recueillement intense...
Papa était très curieux, je me souviens qu'il était abonné à plusieurs magazines comme Historia, Sciences et Vie... le grenier en est plein aujourd'hui.
Oui, parce qu'il garde tout (finalement je dois tenir de lui.... moi aussi je garde tout ! sauf que j'ai pas de grenier ! lol).
Il lisait aussi Paris Match, le poids des mots, le choc des photos..., achetait chaque année l'Almanach Vermot (je ne sais pas s'il l'achète toujours).
Il a toujours craqué sur Spirou... et je lui piquais ses Pim Pam Poum Pipo.
Avec Grand' soeur, on dormait dans la même chambre.
Le soir, après extinction officielle des feux, nous lisions sous les draps, pour que la lumière ne soit pas vue des parents, ça faisait comme une tente.
Je ne sais plus ce que lisais mais j'imagine que j'étais dans les bouquins de la bibliothèque rose, verte, blanche, rouge...
Plus tard, quand j'habitais à Paris, j'avais pris l'habitude d'aller avec ma mob (une cady bordeaux) jusqu'au quartier latin et là je m'achetais d'occase des livres chez Gibert Jeune. J'aimais bien cette époque.
J'allais aussi à la bibliothèque du quartier.
J'avais reperé le rayon "interdit". C'est là que se trouvaient plein de livres passionnants !
Franchement quelle idée d'interdire des bouquins.
Tiens y a qu'à revoir "Le nom de la rose", ça a fini par un immense incendie !
Je ne supportais pas les cours de Français où nous étions obligés de lire les grands classiques. Lire, et expliquer pour lundi, troisième heure... Du moment que j'étais forçée, je n'avais pas du tout envie de lire. Alors je lisais en diagonale et en lecture rapide. J'en avais rien à faire. C'était le supplice. Des générations de gamins dégoûtés à vie de la lecture je vous dis moi !
Certains romans ainsi imposés sont restés donc intouchables pour moi. J'ai pu les découvrir bien plus tard, enfin adulte, et je les ai dégustés.
Penser à changer l'apprentissage du français au collège.
Quand j'ai eu mon premier "chez moi", je lisais dans mon bain (pas que là, mais là particulièrement).
C'était un moment particulièrement jouissif, la musique, la clop, le roman et l'Obao pour la mousse et la couleur bleue de l'eau.
J'avais une petite planche que je posais sur les rebords de la baignoire à la façon d'une petite table et je restais très longtemps, rajoutant de l'eau chaude de temps en temps, et jusqu'à ce que je sois ramollie !
Plus tard, j'ai eu mes deux loustics à quinze mois d'intervalle et en plus je bossais mes 39 heures plus les transports, alors la lecture, j'avais plus trop le temps.
Ensuite ce fut la lecture du soir aux gamins.
Délicieux moment de détente et de complicité avant qu'ils trouvent le sommeil.
Et pour moi ensuite, la paix de la soirée..
La lecture, c'était alors au lit, avec Bill.
Chacun son bouquin.
De temps en temps quand l'un de nous tombait sur un passage trop bien, il le lisait à l'autre.
L'échange était courant, en tout cas les livres passaient d'une table de nuit à l'autre, même si nous n'avions pas les mêmes centres d'intérêt.
L'un comme l'autre, nous avions toujours plusieurs livres différents en cours, curieux de tout, heureux de découvrir.
Il s'endormait souvent avant moi et pour ne pas le déranger, je poursuivais ma lecture à la lampe de poche.
Combien de piles j'ai ainsi épuisé !
En écrivant ce billet aujourd'hui, je vois un rapport avec la lecture de mon enfance, sous les draps.
J'avais quatre cartes de bibliothèque, une pour chacun de nous.
Quand les petits loups étaient là, ils choisissaient eux mêmes.
Parfois, j'y allais seule avec ma tente (mon panier en créole) et je sélectionnais les 16 livres auxquels j'avais droit.
Deux BD pas plus par personne, c'était la règle de la bibliothèque.
Je prenais toujours aux enfants un livre en rapport avec ce qu'ils faisaient en classe, plus un livre pour leur ouvrir l'esprit, un livre à lire, un livre à regarder, etc...
Ils adoraient découvrir ce que j'avais ramené de ma quête et j'étais bien fière de moi quand je voyais leurs yeux briller si ma sélection leur plaisait !
Bill s'était pris de passion pour Zweig par exemple. Il acheta alors, petit à petit, tous les romans de Zweig.
Moi j'ai eu ma période polar.
Quand un écrivain me plaisait, j'avais envie de lire d'autres titres.
J'ai découvert ainsi le juge Ti de Robert Van Gulik ,
le moine Cadfael d'Elis Peters ,
le policier Joe Leaphorn et l'indien navarro Jim Che
du grand Tony Hillerman.
Puis les romans indiens, parfaits pour lire en Inde. Un régal de lire dans le pays de l'auteur, comme dans un bain de civilisation. J'ai une passion pour l'Inde, alors j'ai un rayon de ma bibliothèque consacrée aux ouvrages de ce pays et à l'Asie.
Bill classait les livres par continent, par littérature. Une étagère était ainsi consacrée aux écrivains sud américains (cent ans de solitude, le partage des eaux, le vieux qui lisait des romans d'amour...)
Quand il a disparu en 2006, j'ai arrêté de lire, d'écouter de la musique. Un an après son décès, j'ai quitté notre grande maison pour un tout petit appart, alors j'ai dû me débarrasser de plein de livres. Impossible de continuer à avoir une pièce "bibliothèque" comme avant.
Mes enfants ont fait plusieurs fois la brocante de St Paul, ma fille a mis des bouquins en vente sur internet. Il m'en reste encore beaucoup.
J'ai recommencé à lire, mais très peu, plus comme avant. Je marche aux coups de coeur. Si un livre me plaît, je ne le quitte plus. Il fait partie de moi comme je fais partie de lui.
Avec Ayla, je vivais au temps de la préhistoire. Jean Auel m'avait emportée dans son monde. Mon corps était au XXIème siècle mais mon esprit était dans les cavernes...
Avec les livres, je me méfie maintenant. J'ai peur du passage qui va me submerger, me replonger dans ma douleur enterrée. Je lis toujours au lit,
calée contre l'oreiller, au chaud sous ma couette. Ma main semble morte parfois à force de tenir ma tête quand je suis couchée sur le côté. J'ai toujours, et encore, plusieurs livres dans ma
table de nuit. Prêts à lire. Ca reviendra. C'est sûr.
Je ne tague personne mais si vous avez envie d'écrire à votre tour, lâchez vous !